09 mai 2010

Hommage aux résistants de Duras

De gauche à droite : Jean Briseau (1910-1944) , Maurice Dubois (1912-1944) et françois Laguerre (1910-1944);

Une cérémonie d'hommage aux 28 martyrs de Bordelongue (cliquez)
aura lieu le 15 mai 2010 à 9h00 place des Glières à Toulouse (voir la carte)
sous le haut patronage de Monsieur Dominique Bur, Préfet de la région Midi-Pyrénées

Renseignements 05 61 44 38 64

Nous vous rappelons que parmi ceux-ci figurent trois duraquois dont les noms figurent sur les plaques des principaux boulevards de la ville. On notera aussi le lourd tribut payé par le département de Lot et Garonne : parmi les 28 martyres de Bordelongue, la moitié habitaient ce département.

Republication d'un article du 8 avril 2009 :
65ème anniversaire de l’exécution, à la prison Saint Michel de Toulouse de trois résistants de Duras : Jean Brisseau, Maurice Dubois et François Laguerre dont un boulevard et deux avenues commérorent le sacrifice. Tous sont portés membres du SOE (Special Operations Executive), organisme de service secret britannique, complètement autonome, créé dès 1940 par le premier Ministre Winston Churchill, pour organiser des opérations subversives dans la France occupée et qui assura la plus grande partie des parachutages d’armes et de matériel radio (voir texte précédent de Mariens Borcy). 4 des réseaux , parmi les 95 organisés en France et connus aussi sous le nom de réseaux Buckmaster, du nom du chef de la section F., française, ont intéressé le grand sud-ouest : PRUNUS (ou EUGENE ) créé dès avril 1942 centré sur Toulouse et jusqu’à la Dordogne sud et le Lot et Garonne nord-est, WHEELWRIGHT ou HILAIRE, plus vaste, de la Dordogne sud aux Pyrénées, dont le QG était à Castelnau sur Auvignon, près de Condom dans le Gers, et 2 réseaux successifs pour la Gironde et la côte Atlantique, SCIENTIST, dès juillet 1942 et ACTOR en 1944. La plupart étaient commandés par des officiers britanniques, cependant récemment mobilisés ou engagés.

Les 3 résistants duraquois fusillés ont essentiellement participé à des parachutages d’armes et d’explosifs. Ils ont aidé à la formation des comités de réception avec d’autres résistants (en particulier communistes, et des jeunes échappés des chantiers de jeunesse ou réfractaires du STO, la plupart regroupés dans un maquis clandestin qui constituera en 1944 le bataillon de Duras, mais naît dés 1942 à l’initiative de René Duprat de Cazaugitat en Gironde), en préparant les terrains en forêt, en réceptionnantant les parachutages, en transportant les containers avec des charettes et le camion de Jean Brisseau., boucher-expéditeur, parfois aussi celui de Jean Dufour de Saint Jean de Duras, en prévoyant enfin les caches d’armes, connues des seuls responsables et du chauffeur du camion. François Laguerre, chef de gare, était le chef du secteur de Duras du SOE, et a organisé aussi d’éventuels transports par chemin de fer. Il semble ne pas avoir appartenu à un mouvement de résistance, comme mon père d’ailleurs ; M. Dubois par contre était communiste. Le contact avec le SOE semble s’être fait dès 1942 par Christophe (Louis Levy réfugié d’Alsace à Vicq Fezensac) qui était l’agent de liaison de Philippe de Gunzbourg du réseau Prunus; également par les contacts de Maurice Dubois avec la Loge de Monségur dont plusieurs membres sont également enregistrés dès 1942 sur les listes établies pour ce réseau après la Libération, enfin par un contact de François Laguerre à Saint Vivien de Monségur.

Le premier parachutage a eu lieu dans la nuit du 3 mars 1943, dans les bois de Navarre, au lieu dit Fontbouet, chez Lenoir dit-on aussi (message radio: « le maquereau est un poisson de mer »). Il concernait la réception d’explosifs destinés à « traiter » les poudreries de Bergerac et de Toulouse et fut organisé par le SOE pour le compte de Prunus, sous l’autorité de Philippe de Gunzbourg (alias Philibert) responsable de tout le secteur de la vallée du Dropt et en liaison avec le mouvement de résistance Combat dont le responsable local était Albert Cambon à Marmande qui deviendra le chef de l’Armée secrète gaulliste. Si la poudrerie de Bergerac connut plusieurs sabotages, l’action sur Toulouse échoua ; les explosifs parvinrent à Marcel Petit, directeur de l’école vétérinaire, mais l’infiltration d’un agent allemand dans l’usine, permit l’arrestation d’une vingtaine de personnes, le 12 avril 1943, au 22 rue des Pyrénées, dont le chef du réseau, le jeune lieutenant Maurice Pertschuk (Eugène), puis en un autre lieu, son radio Markus Bloom qui furent déportés et tués en Allemagne . Ce fut la fin tragique du réseau Prunus à laquelle Philippe de Gunzbourg, absent de Toulouse, échappa, rejoignant Wheelwright et son chef le lieutenant-colonel George.R. Starr.

Les autres parachutages eurent lieu dans les bois du Duc, à Bonin, plus accessibles, au Cap de l’Homme à Lévignac, et à la Ragotte où eut lieu le 17 décembre 1943 une tragédie relatée ici-même par une survivante, Mme Yvette Ossard . Précisons qu’il n’y avait pas d’adhésion au SOE et qu’il est vraisemblable que seul François Laguerre ait connu son existence, car il a pu rencontrer en tant que chef de secteur, Philippe de Gunzbourg. Par contre, tous écoutaient la radio anglaise car c’était indispensable, bien qu’interdit, pour connaître, dans les « messages personnels » le nom de code et l’heure du parachutage à venir.

Maurice Dubois et Jean Brisseau ont été arrêtés le matin du 9 février 1944, chez eux, à Duras. Le premier, qui avait échappé à plusieurs alertes, a essayé de sauter par la fenêtre de sa maison du carrefour routes de Marmande et Montségur, et, blessé dans sa chute et par des coups de feu, fut rattrapé au boulevard du nord ; Jean Brisseau fut arrêté à midi ,en rentrant de son travail, devant chez lui, alors que les Allemands occupaient sa maison et nous menaçaient, ma mère, mon frère de 9 mois et moi avec leurs armes, leurs chiens, leurs vociférations, mon frère aîné âgé de 10 ans, ayant assisté aussi à l’arrestation depuis une maison voisine devant laquelle il avait joué. Des voitures avec des civils dont certains étaient masqués, accompagnaient les camions allemands. Plusieurs enfants de l’école en face, de la maison, empêchés de sortir par leur maitre après les échanges de coups de feu et l’arrivée des camions, m’ont aussi raconté la scène, qu’on peut lire dans le livre de René Blanc : La Résistance à Duras, 1992. François Laguerre sera arrêté le 25 février, à la gare, ayant refusé d’interrompre son travail et de prendre la clandestinité au maquis. En mars Pierre Georges Bariteaud à Lévignac et d’autres résistants à Cours et Taillecavat en mai, reçurent des visites de la milice ou des Allemands, mais purent s’échapper.On sait, de façon certaine, au-delà d’autre rumeurs concernant des miliciens y compris de ma propre famille, que nos patriotes ont été dénoncés par un père et son fils qui s’étaient introduits dans le maquis de Bonin pour échapper au STO, et qui ont été abattus par les résistants peu après ; concernant mon père, il y avait aussi avec eux une histoire de jalousie de travail à l’abattoir et même un problème de furet que nous avions abattu dans notre poulailler peu avant.

Tous ont été emmenés à Agen puis à la prison Saint Michel de Toulouse, ma mère n’ayant pas su pendant longtemps s’ils étaient à Toulouse ou à la prison du Hä de Bordeaux. Nous ne savons rien de la détention car les archives de la section allemande où ils se trouvaient ont été détruites dans le convoi les emmenant vers l’Allemagne en Juillet 1944. On sait par les lettres à leur famille et en particulier celle très précise de François Laguerre à son père (AD de Toulouse, dossier Philippe de Gunzbourg), qu’à la suite d’un attentat à l’explosif près de Purpan, contre un tram portant des officiers allemands, le 1er avril 1944 (atttentat commis en fait par la Brigade MOI Marcel Langer de Toulouse) et alors que Toulouse venait de recevoir son premier bombardement allié, ils ont été désignés (au sort ?) comme otages ; jugés coupables par un tribunal allemand très expéditif, le matin du 8 avril, puis ont été fusillés dans un groupe de 8 à 10 personnes vers 17 heures dans la cour de la prison, et enfouis le soir même dans la fosse commune de Bordelongue dont nous avons parlée l’an dernier dans le même blog. Ils étaient jeunes : 30 et 32 ans. Les corps n’ont été retrouvés qu’après la Libération, reconnus par les familles le 11 septembre . Jean et Maurice n’ont été enterrés à Duras que le 16 septembre, et F. Laguerre à Toulouse. Ont subi le même sort le 8 avril, Roger Lévy de Sainte Bazeille arrêté le 9 mars 1944 et Jean Roger Bancheton de Neuffons en gironde arrêté en novembre 1943, tous membres du SOE, le second étant le père de Claude Blancheton, venu habiter à Duras à la suite de son mariage, viticulteur comme son père et ex-conseiller municipal.

On doit ajouter que le SOE, par la formation de corps francs après le débarquement, et la concentration d’armes des parachutages, certaines distribuées aussi à des groupes FTP, ont grandement contribué à la libération de notre pays, en freinant dans le sud-ouest en particulier, après le 6 juin, le repli des troupes allemandes du sud vers la Normandie, puis par les combats et sabotages dans les rangs des FFI sous les ordres du général Koenig, actions décisives que le général De Gaulle a été long à reconnaître, ce qui explique que cet organisme soit si méconnu.

Jeanine Brisseau-Loaiza
Professeur
Université de Pau

PS : Figure également parmi les martyres de Bordelongue Jacques Sauvegrain, polytechnicien, résistant, chevalier de la Légion d'Honneur, fusillé en novembre 1943, enterré à Soumensac (canton de Duras)

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour
Je suis sur la trace d'un Maurice Dubois qui aurait servi en 1939 1940 dans les chars. plus particulièrement au 7ème Bataillon de Char de Combat.
Son age remd plausible cette hypothèse mais ...
Est il possible d'imaginer qu'il s'agisse du même homme ?
Merci
Cordialement
Sylvain FREROT
aries94250@yahoo.fr

J. Prunet a dit…

Bonjour ,

A la lecture de l'Hommage aux résistants de Duras j'ai découvert que René Blanc avait écrit un livre : "La résistance à Duras .
Je me suis déplacé à la bibliothèque de Duras où l'on a aucune connaissance de l’existence de ce livre . C'est un livre que j'aurais bien aimé lire .
Le sujet m'intéresse , mon beau père faisait partie des maquis de Duras
Merci des informations que vous pouvez me donner
Jacques PRUNET
prunet.jako@orange.fr

1er février 2013